mardi 9 décembre 2014



Une enquête du Sénat américain accuse la CIA d'avoir menti à la Maison Blanche et au Sénat et révèle des pratiques d'interrogatoires qui ont outrepassé la loi.

Un rapport du Sénat américain paru mardi 9 décembre, critique très sévèrement les méthodes de torture de la CIA dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme » après les attentats du 11 septembre 2001. L'enquête parlementaire, dont vingt conclusions et un résumé d'environ 500 pages, expurgés des informations les plus sensibles, ont été rendus publics par la commission du renseignement du Sénat, révèle que les techniques renforcées d'interrogatoire de la CIA « n'ont pas été efficaces » et ont été « bien pires » que ce que l'agence d'espionnage avait reconnu jusqu'à présent.

Le rapport accuse l'agence d'avoir soumis 39 détenus à des techniques brutales pendant plusieurs années, dont certaines n'étaient pas autorisées par l'exécutif américain. « La CIA a employé ses techniques d'interrogatoire renforcées à répétition pendant des jours et des semaines », décrit le rapport.
Les détenus ont été jetés contre les murs, dénudés, placés dans des bains glacés, empêchés de dormir pendant des périodes allant jusqu'à cent quatre-vingts heures. Le détenu Abou Zoubeida, après avoir subi des simulations de noyade à répétition, « avait de la mousse sortant de la bouche », détaille encore le document.
PROGRAMME INEFFICACE
« A aucun moment les techniques d'interrogatoire renforcées de la CIA n'ont permis de recueillir des renseignements relatifs à des menaces imminentes, tels que des informations concernant d'hypothétiques “bombes à retardement” dont beaucoup estimaient qu'elles justifiaient ces techniques », a déclaré lors de sa présentation la présidente de la commission du renseignement, la démocrate Dianne Feinstein.
L'enquête accuse la CIA d'avoir « menti », non seulement au grand public mais aussi au Congrès et à la Maison Blanche, sur l'efficacité du programme, notamment en affirmant que ces techniques avaient permis de « sauver des vies ».
Le sixième point du rapport établit par ailleurs que « la CIA a activement évité ou empêché la supervision du programme par le Congrès », comme le relève Gilles Paris, le correspondant du Monde à Washington.
Le président Barack Obama a dénoncé des méthodes « contraires » au valeurs des Etats-Unis, quelques minutes après la publication du rapport. « Ces techniques ont fortement terni la réputation de l'Amérique dans le monde », a expliqué M. Obama, qui avait officiellement mis fin à ce programme dès son arrivée à la tête du pays, en janvier 2009, promettant de tout faire pour que ces méthodes ne soient plus jamais utilisées :
« Aucune nation n'est parfaite, mais une des forces de l'Amérique est notre volonté d'affronter ouvertement notre passé. »
Le président américain a jugé, lundi, que la publication de ce rapport était utile, « pour permettre aux gens aux Etats-Unis et à travers le monde de comprendre exactement ce qui s'est passé ».
LA CIA CONTREDIT LE RAPPORT
Le patron de la CIA, John Brennan, a admis que l'agence avait commis des erreurs en utilisant la torture comme méthode d'interrogatoire, mais contredit le rapport du Sénat, insistant sur le fait que cela avait permis d'empêcher d'autres attentats, après le 11-Septembre.
Selon M. Brennan, une enquête interne menée par la CIA a mis en lumière que les interrogatoires poussés contre des suspects de terrorisme avaient « permis de récupérer des renseignements qui ont permis d'empêcher des attentats, de capturer des terroristes et de sauver des vies ».
Plusieurs responsables républicains ont immédiatement dénoncé un rapport partisan, une « réécriture d'événements historiques », selon un communiqué de Mitch McConnell, chef des sénateurs républicains, et du vice-président républicain de la commission du renseignement, Saxby Chambliss. De nombreux républicains disent craindre que la transparence ne donne du grain à moudre aux « ennemis » de l'Amérique, et suscite des représailles.
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Vos réactions (22) Réagir
Jean-Baptiste Clamence 09/12/2014 - 21h22
Bon, qui va en Prison?
 
CHRIS 09/12/2014 - 20h39
Je ne peux m'empêcher de penser que quand nous regardions la clique de Bush gesticuler avec l'assentiment de sa population avec une PURE malhonnêteté, nous étions complices de par notre silence jusqu'au jour du discours de Dominique De Villepin. Merci Monsieur le ministre des affaires étrangères.
 
keora 09/12/2014 - 19h57
On dit que les responsables musulmans vont aussi faire un bilan des atrocités commises du côté des islamistes, on dit... que c'est déjà écrit.
 
Phil 09/12/2014 - 19h56
Donc d'après Obama Torturer c'est mal mais tuer avec des drones dans des pays où on est pas en guerre c'est bien
 
luce prima 09/12/2014 - 19h51
Mais c'est précisément par ce que la transparence donne du grain à moudre aux ennemis des USA que les Républicains doivent l'exiger. Quand ils se révèleront ils pourront les combattre sans monter une usine à gaz d'espionnage pour les trouver.
 
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