samedi 4 avril 2015


 Jean-Baptiste Lully (ou Giovanni Battista Lulli) est un compositeur et violoniste de la période baroque, français d'origine italienne, surintendant de la musique de Louis XIV. Il est né à Florence le 28 novembre 1632 et mort à Paris le22 mars 1687.

Par ses dons de musicien et d'organisateur aussi bien que de courtisan, voire d'intrigant, Lully domina l'ensemble de la vie musicale en France à l'époque du Roi-Soleil. Il fut l'un des principaux promoteurs du développement de plusieurs formes de musique qu'il organisa ou conçut : la tragédie en musique, le grand motet, l'ouverture à la française. Son influence sur toute la musique européenne de son époque fut grande, et de nombreux compositeurs parmi les plus doués (Henry Purcell,Georg Friedrich HaendelJohann Sebastian BachJean-Philippe Rameau) lui sont redevables à un titre ou un autre.

Une origine florentine


Fils du meunier Lorenzo di Maldo Lulli et de Catarina del Sera, elle-même fille de meunier, il est remarqué vers 1645 parRoger de Lorrainechevalier de Malte et duc de Guise. Arrivé en France l'année suivante2, il entre comme garçon de chambre au service de la duchesse de Montpensier (dite la Grande Mademoiselle), qui désirait parfaire ses connaissances en langue italienne. Le trouvant laid[réf. nécessaire], elle l'envoie en cuisine.

Les débuts à la cour de France

Arrivé en France à l'âge de treize ans, il devient le premier compositeur de la cour, et ses airs et ballets consacrèrent sa réputation. Il apprit le violon, le clavecin, la théorie et la composition musicale avec Nicolas Metru et se montra excellent danseur. Ses talents enfin reconnus par la duchesse, il crée pour elle la « Compagnie des violons de Mademoiselle » dont elle était très fière car ils étaient meilleurs que les « 24 violons du Roi ». En 1652, après la Fronde et sa séparation d'avecMlle de Montpensier tombée en disgrâce, Louis XIV de France l'engagea dans la Grande Bande des Violons du Roi, composée de 24 instruments. En 1653, Lully dansa avec le roi dans le Ballet royal de la nuit. Il obtint rapidement la direction d'un nouvel ensemble : La Bande des Petits Violons. En 1659, Lully triomphe avec le Ballet d'Alcidiane.

Surintendant de la musique royale[modifier | modifier le code]

Parfait courtisan, homme d'affaires habile et appuyé par Louis XIV, il devint compositeur de la chambre, puis surintendantde la musique royale. Lully était aussi danseur. Il écrivit pour le roi un ballet qui représentait le soleil (Louis XIV) au centre et les planètes (ses ministres) autour de lui, de façon à montrer que Louis XIV était le maître (à l'instar du soleil qui est le centre de l'univers) ; d'où le surnom de « roi soleil » donné à Louis XIV.
Naturalisé français en 1661, il épousa quelques mois plus tard Madeleine Lambert, dont le père, Michel Lambert, dirigeait la musique chez la duchesse de Montpensier. Ils eurent six enfants, dont trois fils qui furent musiciens à leur tour (LouisJean-Baptiste et Jean-Louis) et trois filles dont l'aînée, Catherine-Madeleine, épousera en 1684 Jean-Nicolas de Francine, qui succédera à Lully à la tête de l'Académie royale de musique.
À partir de 1664, Lully travailla régulièrement avec Molière (qui le surnommait « le paillard »), créant ainsi le genre de la comédie-ballet, sans cependant renoncer aux ballets de cour. Les pièces de ce dernier sont alors une combinaison de comédies, de ballets et de chants : L'Amour médecin en 1665, la Pastorale comique en 1667, George Dandin en 1668, Monsieur de Pourceaugnac en 1669, Le Bourgeois gentilhomme et sa turquerie. Mais en 1671 les deux hommes se fâchèrent et devinrent ennemis. Il n'est toutefois pas prouvé que, même s'ils collaborèrent, ils furent amis. Aucun rédacteur de gazette, mémorialiste ou biographe ne fait mention d'une amitié, pas plus que de leur brouille qui fut à l'époque un non-événement.
Buste par Antoine Coysevox sur la tombe de Lully à la basilique Notre-Dame-des-Victoires de Paris.
En 1672, Lully acheta le privilège accordé en 1669 à Perrin de l'Académie d'Opéra qui prit dès lors et jusqu'à la Révolution le nom d'Académie royale de musique3. Il compose sa première tragédie en musique (tragédie lyrique) intitulée Cadmus et Hermione en 1673 sur un livret de Philippe Quinault (1635-1688) qui devient son librettiste attitré. Comblé d'honneurs et de richesses, Lully composa alors approximativement une tragédie en musique par an, éclipsant, par la faveur dont il jouissait auprès du roi, tous les compositeurs dramatiques de son époque : Marc-Antoine CharpentierAndré CampraLouis-Nicolas Clérambault. En 1681, Lully atteignit l'apogée de sa carrière en devenant secrétaire du roi.
En ce qui concerne la sexualité de Lully, Louis XIV avait en horreur ce qu'on nommait alors les « mœurs italiennes ». Aussi, quand en 1685, les relations de Lully avec Brunet, un jeune page de la Chapelle, firent scandale, Lully perdit quelque peu de son crédit auprès du roi qui n'assista pas aux représentations de son dernier opéra, Armide, en 1686.
Lully composa sa dernière œuvre complète, Acis et Galatée, pastorale en forme d'opéra, pour la cour plus volage du Grand Dauphin, fils de Louis XIV[réf. souhaitée].

Mort[modifier | modifier le code]

La cause de sa mort fut particulière puisqu'elle intervint à la suite d'une répétition du Te Deum qu'il devait faire jouer pour la guérison du roi. N'arrivant pas à obtenir ce qu'il voulait des musiciens, Lully, d'un tempérament explosif, s'emporta et se frappa violemment un orteil avec son « bâton de direction », longue et lourde canne surmontée de rubans et d'un pommeau richement orné, servant à l'époque pour battre la mesure en frappant le sol. Étant danseur, il refusa qu'on coupât sa jambe qui s'infectait, la gangrène se propagea au reste du corps et infecta en grande partie son cerveau4. Lully meurt quelque temps après à Paris, le 22 mars 1687, « âgé de 55 ans ou environ, dans sa maison, rue de la Magdelaine»5. Son corps est porté chez les religieux Augustins déchaussés (les Petits Pères) et est enterré dans leur église Notre-Dame-des-Victoires, selon le testament de Lully. Madeleine Lambert, son épouse, y avait acheté la chapelle Saint-Nicolas-de-Tolentin au prix de 3 000 livres.
Dans le tombeau de Lully sont par la suite inhumés un grand nombre de membres de la famille Lully-Lambert6 :
Le tombeau de Lully est enlevé de la chapelle pendant la Révolution française en janvier 1796 et installé au musée des Monuments français. Il est rendu sur décision du préfet de la Seine Gaspard de Chabrol, en date du 15 mars 1817, et placé avec quelques modifications dans la chapelle Saint-Jean-Baptiste de l'église Notre-Dame-des-Victoires. Pendant la Commune de Paris, comme de très nombreux monuments parisiens, l'église est totalement saccagée et pillée par les Communards et les tombeaux, dont ceux de la famille Lully, sont profanés et vidés. Les Communards avaient notamment appris que le curé de l'église avait caché tous les objets de valeur dans le tombeau du musicien7.
Le tombeau de Lully se trouve aujourd'hui au-dessus du cintre de la travée entre la chapelle Saint-Jean et celle de l'Enfant Jésus de la basilique Notre-Dame-des-Victoires. C’est un sarcophage de marbre noir, surmonté du buste en bronze du grand musicien, modelé par Antoine Coysevox et accosté de deux pleureurs sculptés par Cotton. Au-dessous du buste, on peut voir deux génies : la « Musique profane » et la « Musique sacrée ». De l’autre côté de la travée, sur la paroi opposée, dans la chapelle voisine, un autre buste en marbre blanc complète le mausolée8.

Postérité de son œuvre[modifier | modifier le code]

C'est principalement pour sa contribution à la musique religieuse et à la musique de scène que Lully nous est connu. Il restera dans l'histoire comme le véritable créateur de l'opéra français. Il composa 14 tragédies lyriques dont les plus belles sont peut-être Thésée (1675), Atys (1676), Phaéton (1683) et son chef-d'œuvre Armide (1686). À l'aise aussi bien à l'église qu'au théâtre, il est l'auteur de plus de 20 grands motets, dont le fameux Te Deum de 1677, ainsi que de 11 petits motets d'un style plus italianisant.
Admiré par les musiciens de son temps, il fut joué sans discontinuer jusqu'à la Révolution de 1789, et son influence fut immense en France sur des compositeurs commeFrançois CouperinMarin MaraisJean-Philippe Rameau, mais aussi dans l'Europe entière. Les gardiens de sa tradition alimentèrent en 1733 ce que l'on appela la Querelle des Lullystes et des Ramistes. Certains de ses élèves contribuèrent au rayonnement de son style en dehors de la France : dans les pays germaniques Georg Muffat (qui a d'ailleurs décrit dans les préfaces de ses éditions les pratiques de Lully pour l'instrumentation, l'ornementation, les coups d'archet et la discipline de l'orchestre), Johann Sigismund Kusser(qui portait en France le nom de Cousser), Johann Caspar Ferdinand Fischer et les italiens Vincenzo Albrici et Agostino Steffani.
Lully a également eu une influence considérable sur les compositeurs d'opéra de la fin du xviiie siècle, surtout à l'occasion de la « réforme » de l'opéra qui a consisté à supprimer ce que l'on considérait alors comme un vocalisme excessif nuisant à l'efficacité théâtrale. C'est ainsi qu'en écrivant Roland et AtysPiccinni (le deuxième Italien après Lully à devenir compositeur pour l'opéra royal) a utilisé des livrets de Quinault révisés par Marmontel). De la même façon, Gluck et Tommaso Traetta ont écrit Armide sur le livret de Quinault. En somme, Lully, qui estimait qu'il fallait chanter ses opéras comme la Champmeslé déclamait à la Comédie-Française, semble avoir créé, bien plus que Wagner, l'idéal du drame en musique — la « tragédie en musique », comme il l'appelait d'ailleurs [réf. nécessaire].

Vie privée[modifier | modifier le code]

Jean-Baptiste Lully est bisexuel, ayant entretenu de notoires relations avec des hommes et des femmes9,10,11. De par les relations privilégiées qu'il entretient avec le roi, Louis XIV ferme les yeux sur sa bisexualité10.
Jean-Baptiste Lully épouse Madeleine Lambert (1643-1720), fille de Michel Lambert et de Gabrielle Dupuy, le 24 juillet 1662 en l'église Saint-Eustache à Paris12. De cette union naissent six enfants13 :

Œuvre[modifier | modifier le code]

Lorsque Lully créa son orchestre, il en fit le premier d’Europe pour la discipline et le rythme. Il fit travailler lui-même les chanteurs, les danseurs, et régla tout dans son théâtre jusqu’au plus petit détail.
Cette volonté organisatrice se manifeste également dans son œuvre. Le Cerf de La Viéville nous dit que Lully « allait se former sur les tons de la Champmeslé ». Son souci principal est, en effet, d’imiter autant que possible dans son chant la déclamation des grands acteurs du xviie siècle, qui s’appliquaient surtout à respecter scrupuleusement laprosodie. Aussi Lully a-t-il soin, non seulement de placer toujours une note longue sur une syllabe accentuée, une note courte sur une syllabe non accentuée, mais encore de marquer un arrêt à la césure et à la rime.
Mais où Lully excelle, c’est dans la musique descriptive : et c’est encore le fait d’un artiste plutôt intellectuel. Son air du sommeil dans Armide (« Plus j'observe ces lieux »), par exemple, est un chef-d’œuvre.
Lully a joué un rôle considérable dans l’histoire de la musique instrumentale. C’est de lui que date, on peut le dire, l’orchestre moderne, avec son équilibre bien établi de sonorités, avec le quintette des instruments à cordes pour centre de gravité (Lully écrivait à cinq parties d’instruments : dessus de violon (habituellement renforcés par leshautbois et les flûtes), hautes-contre de violon, tailles de violon, quintes de violon et basses de violon (renforcés par le clavecin, le théorbe et le basson). Il a dirigé l'ensemble des « 24 Violons du Roy ».

Catalogue[modifier | modifier le code]

Le catalogue des œuvres de Lully a été réalisé par Herbert Schneider (de)14. Les œuvres, classées par ordre chronologique, sont désignées par les lettres LWV (Lully Werke Verzeichnis) suivies d'un numéro de 1 à 80. La tragédie lyrique Armide est ainsi désignée par LWV 71.

Les ballets de cour[modifier | modifier le code]

Liste des ballets de cour de Lully, par ordre chronologique
LWVTitreDate
Mascarade de la Foire de Saint-Germain1652
Ballet de la Nuit151653
Ballet des Proverbes1654
1Ballet du Temps1654
2Ballet des Plaisirs1655
4Le Grand Ballet des Bienvenus1655
6Ballet de Psyché ou de la Puissance de l'amour1656
7La Galanterie du temps, mascarade1656
8L'Amour malade, ballet du roy1657
9Ballet d'Alcidiane1658
11Ballet de la Raillerie1659
13Ballet de Toulouse, ballet mascarade1660
5Ballet de la Revente des habits du ballet1660
14Ballet de l'Impatience1661
15Ballet des Saisons1661
18Ballet des Arts1663
19Les Noces de village, mascarade ridicule1663
21Les Amours déguisés1664
Ballet du Palais d'Alcine1664
24Mascarade du capitaine1665
27Ballet de la Naissance de Vénus1665
La Réception faite par un Gentilhomme de campagne à une compagnie choisie à sa mode, qui vient le visiter, mascarade1665
28Ballet des Gardes ou les Délices de la Campagne1665
30Le Triomphe de Bacchus dans les Indes ou Ballet de Créquy1666
32Ballet des Muses1666
36Le Carnaval, mascarade royale1668
40Ballet de Flore1669
43Ballet des Nations1670
46Le Ballet des Ballets1671
52Le Carnaval, mascarade1675
59Le Triomphe de l'Amour et de Bacchus161681
La Noce de village, mascarade1683
69Le Temple de la Paix1685

Les comédies-ballets[modifier | modifier le code]

Liste des comédies-ballets de Lully, par ordre chronologique
LWVTitreDate
16Les Fâcheux (une courante, le reste étant de Beauchamps)1661
20Le Mariage forcé1664
22Les Plaisirs de l'île enchantée (La Princesse d’Élide)1664
29L'Amour médecin1665
33La Pastorale comique1667
34Le Sicilien ou l'Amour peintre1667
38George Dandin1668
41Monsieur de Pourceaugnac1669
42Les Amants magnifiques1670
43Le Bourgeois gentilhomme1670

Les tragédies lyriques[modifier | modifier le code]

Liste des tragédies lyriques de Lully, par ordre chronologique
LWVTitreLivretPremière (date)Première (lieu)
49Cadmus et HermionePhilippe Quinault27 avril 1673Parisjeu de paume de Bel-Air
50Alceste, ou le Triomphe d'AlcidePhilippe Quinault19 janvier 1674Paris, jeu de paume de Bel-Air
51ThéséePhilippe Quinault11 janvier 1675Saint-Germain-en-Laye
53AtysPhilippe Quinault10 janvier 1676Saint-Germain-en-Laye
54IsisPhilippe Quinault5 janvier 1677Saint-Germain-en-Laye
56PsychéThomas Corneille et Bernard Le Bouyer de Fontenelle19 avril 1678Saint-Germain-en-Laye
57BellérophonThomas Corneille] et Bernard Le Bouyer de Fontenelle avec l'aide deNicolas Boileau31 janvier 1679Paris, Académie royale de musiquethéâtre du Palais-Royal
58ProserpinePhilippe Quinault3 février 1680Saint-Germain-en-Laye
60PerséePhilippe Quinault17 avril 1682Paris, Académie royale de musique, théâtre du Palais-Royal
61PhaétonPhilippe Quinault6 janvier 1683Château de Versailles
63AmadisPhilippe Quinault18 janvier 1684Paris, Académie royale de musique, théâtre du Palais-Royal
65RolandPhilippe Quinault18 janvier 1685Paris, Académie Royale de musique
71ArmidePhilippe Quinault15 février 1686Paris, Académie royale de musique, théâtre du Palais-Royal
74Achille et Polyxène17Jean Galbert de Campistron7 novembre 1687Paris, Académie royale de musique, théâtre du Palais-Royal